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   18 Compostelle page 19    20

     14 Avril (Mercredi) ...................après Lauzerte - après Moissac
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Aujourd'hui le chemin se confond souvent avec la route .
     Arrivé avant Moissac le paysage change brusquement , et pour la première fois dans le lointain , une horizontal marque la limite entre le ciel et la terre à la place des ondulations auxquelles le regard c'était accoutumé .... ce changement soudain fait une impression bizare .

Photo de gauche : la première horizontale depuis le départ .

     Je pense dépasser Moissac et j'opte pour la variante qui suit l'ancien chemin de halage qui longe le canal des deux mers , aujourd'hui reconverti en "vélo-route".

     Tandis que je marche sur ce chemin je sens une présence derrière moi . Je me retourne et je vois un homme qui marche en poussant son vélo . Comme je vois que sa bicyclette semble en bon état , je lui demande pourquoi il ne monte pas dessus . Il me répond qu'il fait lui aussi le chemin de Compostelle . Mais pourquoi marcher à pied en poussant un vélo ?
    Il m'explique alors que le vélo lui sert à rejoindre sa voiture le soir . En fin d'étape il refait le chemin parcouru en sens inverse . Il mange et dort dans sa voiture , et le lendemain il revient avec son véhicule à l'emplacement ou il s'est arrêté la veille ....et il poursuit son chemin en poussant son vélo .....et ainsi de suite . Celà lui permet de faire le chemin sans avoir recours aux accueils payant ... donc de façon plus  économique.
.

    Je m'imagine pouvoir trouver facilement un emplacement pour la nuit , mais il n'en est rien, j'accumule les kilométres . En effet ce vélo-route est coincé entre le canal des deux mers et le canal construit en dérivation de la garonne , dans le but d'alimenter une centrale nucléaire toute proche . Je devrais donc marcher environ 8 km de plus que prévu , pour pouvoir enfin installer la tente dans un endroit sordide , entouré des panneaux placés par EDF  (Propriété privé ; Passage interdit ; Attention danger de noyade  ) .  
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    Mais le meilleur reste à venir ....de l'autre côté du canal , une voie de chemin de fer et un camp de nomade avec cette plaie que sont ces saletés de clébards qui aboient toute la nuit sans discontinuer .


Photo de droite : le vélo-route après Moissac .
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     15 Avril (Jeudi) ..........................après Moissac - avant Miradoux
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    Ce matin je reprends le chemin sur le vélo-route ... quelle manie de goudronner les chemins de halage .
     Aujourd'hui il y aura beaucoup de ce fameux goudron , car une fois encore le balisage nous conduit souvent sur le route .
     Je camperai en fin de journée dans un bois .
     16 Avril (Vendredi) ................avant Miradoux - après Lectoure

    Déjà 25 jours que je suis sur le chemin , comme le temps passe vite !
    La région est orientée vers la culture de blé , mais le département semble faire de gros efforts pour que les pélerins ne circulent pas toujours sur la route . Des chemins ont été traçé le long des routes ou des champs et des arbres ont été planté .... ce n'est pas très beau mais c'est mieux que le bitume . En tout cas l'intention est bonne .
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Il fait beau et le ciel est bleu ... excepté les jolis petits nuages que transpire la centrale de nucléaire de  Golfech .
     

    Vers 13 h , je fais une pause près d'un étang pour me sustenter ... je prends mon temps .
    Je n'ai pas eu ma dose de bavardage ce matin et je n'ai vu aucun pélerin depuis avant-hier .
    J'ai toujours mal à mon gros orteil droit et j'essaie de le ménager en marchant doucement.
    Au moment même ou j'écris celà sur mon carnet , je vois arrivé un marcheur . Cà m'a l'air d'être un de ces pélerins fonceur . Cà y est il est passé , le nez dans ses batons , à peine l'esquisse d'un bonjour . Celui là n'est pas là pour s'amuser , il n'a pas le temps ... il me fait penser à ces gens qui essaient de faire un chrono sur le trajet autoroutier de leurs vacances .
   Peu après arrivent d'autres pélerins , un peu plus cool ceux là , avec lesquels je discute un peu .
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     Aujourd'hui je mourais de soif , j'ai mangé des pommes et bu comme jamais .
     J'ai encore gaspillé mon argent au Casino ...tout y est hors de prix , et il n'y a que çà ici .

     Ce soir je monte le camp après Lectoure.

Photo de droite : Lectoure
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     17 Avril (Samedi) ................... après Lectoure - Condom
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     J'ai bien dormi . Ce matin la tente est couverte de glace , car il a encore gelé .
     Mon podométre indique 664 km.
     Je pars couvert , mais 1h30 plus tard je suis en bras de chemise , la journée s'annonce chaude .J'essaie de ménager mon gros orteil en marchant tranquillement .
   

      Après 12 km de marche je fais une halte à la chapelle d'Albin , ou je profite d'un peu d'ombre . Je n'ai pas grand chose à manger ... un bout de saucisson et un morceau de pain . Je me fais chauffer un cube de bouillon , puis une tasse de cafè .
     Passe un pélerin ... je le salue , mais il ne me voit même pas . Il fonce le nez dans le guidon, il mouline des pieds et des bras avec ses deux batons de ski , tête baissée . Je m'efforce de ne pas ressembller à celà , et de marcher tête haute , pour voir et rencontrer les "gens" . Malheureusement depuis Moissac on ne voit personne ou presque . Ici ce n'est plus la campagne , ce ne sont que champs et champs , et en ce moment çà pulvérise partout .
     A Condom je fais qelques courses , puis je reprends le chemin pour quitter la ville . Mais devant le refuge municipal , j'engage la conversation avec un habitant , qui finalement m'invite chez lui .
     J'en profite pour me décrasser et prendre un bain de pieds , ce qui a pour conséquence de les faire enfler de façon impressionnante . Je fais aussi un peu de lessive .
     Nous discutons un peu , nous dînons , puis je vais au lit .
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     18 Avril (Dimanche) ........................ Condom - après Montréal du gers
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      Petit déjeuner familial . Mes  pieds sont complétement désenflés .
     J'ai  beaucoup rêvé cette  nuit  , la chambre était encombrée de tas de choses ... çà me fait penser au livre "Le papalagui " ou Touiavii un chef de tribu d'une île des Samoa se demande comment les blancs font pour dormir dans des cases encombrées d'objets hétéroclytes et inutile , alors qu'un simple matelas suffit .
     J'ai un peu mal au dos ... matelas trop moelleux sans doute .
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     Mon hôte me remet sur le chemin ... direction Montréal du gers .  Je chemine à petite allure . Chemin faisant je croise une dame qui a fait le tour de France à cheval en 7 mois . Nous bavardons ensemble un petit moment .
    Vers 13 h je fais une pose à proximité d'une petite église perdue dans la campagne au milieu des vignes (église de Routges)
    A Montréal du gers je rencontre des personnes de l'aisne qui font le chemin avec un âne . Nous échangeons nos expèriences et points de vue . D'autres personnes s'attardent et se joignent à la discussion . On rit beaucoup car leur âne fait du 6 km/h , démentant l'idée reçu selon laquelle l'âne marche à petits pas ... eux ont du mal à le suivre , et ils sont crevés , d'ailleurs ils viennent de décider de s'arrêter une journée pour reprendre des forces . Le pire c'est que l'âne aussi va en reprendre .
     Je n'ai plus d'eau , mais un couple qui voyage en camping-car m'offre une bouteille d'un litre et demi d'eau minéral ... cool pas besoin de chercher un point d'eau .
     Finalement je n'irais pas beaucoup plus loin que Montréal , je m'installerai dans une peupleraie , un endroit que je crois tranquille .
     Aujourd'hui j'ai fait une petite étape ... je n'ai parcouru que 21 km en prenant tout mon temps .
    La tente est encore trempée de la soirée glacée de Lectoure , mais elle séche vraiment rapidement .
    Je profite de la rivière pour faire une petite toilette , mais c'est un peu compliqué car les rives sont abruptes et instables . Alors je dois accrocher ma serviette au bout d'un baton pour pouvoir la tremper dans l'eau . Quelques orties viennent ajouter un peu de piquant à la situation .
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     19 Avril (Lundi) ..........après Montréal du gers - avant Nogaro
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Nuit de folie !
     Vers 21 h j'entends des "Kiki fais pas ci !" et des "Kikis fais pas çà!" . Zut , il y a une habitation toute proche cachée dans la forêt, et que je n'avais pas vu .... je me croyais seul, c'est râté !
     Au environ de 21h30 les chiens se mettent à aboyer , hé oui ils sont deux ... un petit et un gros !
Photo de gauche : Ce jour là , quand le soleil se lève je suis déjà sur le chemin depuis longtemps !
   
   
     
 Je me dis que je suis parti pour une nuit d'enfer , mais ce sera pire que ce que je peux imaginer . Ces saletés de clébards aboient sans discontinuer , et quand je dis sans discontinuer c'est sans discontinuer ... je me demande encore comment c'est possible .
    Une heure passe , puis deux .... j'essaie de me fabriquer des boules quies avec de la mie de pain , j'entoure mes oreilles avec du tissus , puis je m'enveloppe avec mon chéche . Rien n'y fait ils aboient tellement fort que même épuisé je n'arrive pas à m'endormir . Comment peut on accepter çà !
     A 4 h du matin , ils n'ont pas arrêtés une seconde , c'est invraisemblabe . Je ne peux plus tenir , il faut que je parte d'ici .
     A la lumière de ma lampe frontale , en pleine nuit , je lève le camp !
     Je reprends le chemin dans le noir , et pour arranger les choses celui ci est mal balisé dans le secteur . Croix au milieu des intersections .. laquelle est la mauvaise . Puis chemin d'herbe haute avec sol inégal et ornières . Finalement je me perds et je me retrouve dans une cours de ferme au milieu d'autres chiens qui aboient .... des lumières s'allument , je décanille en vitesse ... il ne manquerait plus que je me fasse plomber cette fois .
     Un peu plus loin je traverse un hameau , et ma lampe frontale éclaire des panneaux qui contiennent des inscriptions pas très rassurantes , du genre : " Pélerins passez votre chemin sans vous arrêter ." . Non je ne rêve pas , d'autres pélerins les ont vu et les ont même pris en photo .... hallucinant !
     A 8h j'ai déjà parcouru 13 km
     Je décide de prendre la route en passant par Bretagne d'Armagnac , ou je ferais une petite pause repas .
     Je me remets en route et je dépasse Eauze ou je fais une grosse sieste dans un prè sur le bord du sentier .... je dormirais plus de deux heures , et celà amusera quelques pélerins qui plus tard me diront être passé sur la pointe des pieds pour ne pas me réveiller . Evidemment ils ne savaient pas que je marchais depuis 4h30 du matin .
     Je marche plus facilement et finalement je m'approche de Nogaro , après avoir parcouru 35 km .
     En fin de journée j'installe la tente près de l'église de l'hospital , qui est dans la nature . J'ai à peine fini , qu'une voiture arrive et j'entends des gens crier "Youkiii , Youkiii , viens iciii" , "Youkiii , Youkiiiii " .
   Non d'un chien , çà ne va pas recommencer comme hier !  Au bout d'un certain temps j'entends les portières claquer et la voiture redémarrer . Youki c'est taillé , tant mieux , qu'il aille au diable ....... et surtout qu'il y reste !
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